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1986-2006 : L'Union des Avocats Européens

 

Vingt ans de congrés et de d'activités sans frontières au profit de l'Europe des avocats

CONGRES UAE

 

PUBLICATIONS UAE

 

1996 : Xème anniversaire UAE

 

2006 : XXème ANNIVERSAIRE UAE

 

Vingt ans après……

 

CONGRES 20EME ANNIVERSAIRE UAE

 

VENISE

23-25 novembre 2006



 

Bertrand Favreau-Photo Jean-René Tancrède
Bertrand FAVREAU
Président fondateur de l'UAE

Venise 23 novembre 2006
Photo Jean-René Tancrède

Hommage à Giuseppe MINIERI

Le seigneur des canaux

 

Bis repetita. Il est toujours périlleux de vouloir renouveler un succès. Pourtant Giuseppe MINIERI l'a osé et y a réussi. Pour célébrer le vingtième anniversaire de la création de l'Union des Avocats Européens (UAE), après avoir organisé, il y a dix ans à Venise, un congrès inoubliable, il n'a pas craint de récidiver dans le cadre majestueux de la Fondation Giorgio Cini sur l'île de San Giorgio Maggiore.

 

Et, vingt ans après, ils étaient tous venus. Mais ils n'étaient pas seuls. A leurs côtés, les chefs des plus prestigieuses juridictions d'Europe, Cours Constitutionnelles, Cours suprêmes (pour la France : M. le Premier président Guy Canivet pour la Cour de Cassation et M. le président Jean-Marc Sauvé, pour le Conseil d'Etat) et au-delà, les Présidents des juridictions non seulement européennes mais internationales. Jusqu'à la Cour suprême des Etats -Unis présente en relai vidéo….

 

Réunis dans le cadre de la salle des tapisseries de San Giorgio pour célébrer à la fois en un seul et même congrès, le 20ème anniversaire de la création de l'Union et la recherche d'efficience, d'effectivité et d'efficacité de la justice et du droit.

 

Une fois encore, en guise de clôture des cérémonies de célébration du 20ème anniversaire de la fondation le 21 novembre 1986, de l'UAE, commencées à la Cour de Justice des Communautés Européennes de Luxembourg en juin dernier, Giuseppe MINIERI a réussi la prouesse d'une réalisation fastueuse dont chaque intervenant a tenu à célébrer, tour à tour, le caractère inoubliable et les lendemains fructueux.

 

Au terme du congrès, ont été portés sur les fonds baptismaux un Observatoire sur l'efficacité des systèmes de justice dans les états membres de l'Union Européenne mais aussi sur tout l'espace européen et une " Consulta " réunissant désormais avocats et juges participeront pour un échange fructueux et périodique, sinon continuel, d'avis, d'opinions et d'expériences inspirés par leur travail professionnel et quotidien dans le domaine de la justice.

 

Ainsi, ce vingtième anniversaire restera dans toutes les mémoires. Déjà, chevalier de Saint Marc depuis 1996, Giuseppe MINIERI, véritable Prince de San Giorgio et seigneur des canaux de la Sérénissime, avait aussi fait ouvrir le réfectoire de Palladio, pour lequel Véronèse avait conçu les Noces de Cana, afin d'y convier à diner ses invités aux accents de Telemann et d'Alessandro Scarlatti.

 

Et plus encore, en point d'orgue, il avait obtenu les clefs du Teatro la Fenice, offrant un concert privé lors duquel Proseco, Traviata et septuor de Beethoven opus 20 préludèrent à un dîner dans les salons de l'illustre théâtre qui a connu une nouvelle naissance depuis quelques mois, après avoir été dévoré par les flammes. Et tous les participants en ont retenu l'image - ô combien symbolique – d'une Europe toujours en péril mais qui sait renaître de ses cendres.

 

Grazie, Signore Decano.

Bertrand FAVREAU

 

 

Vingt ans après……

Discours de M. le bâtonnier Bertrand FAVREAU

Président Fondateur de l'UAE

 

CONGRES 20EME ANNIVERSAIRE UAE

 

VENISE

23-25 novembre 2006

 

 

 

Mes Chers Amis,

 

Je ne dissimulerai pas que j'ai été profondément touché par la demande que m'a adressée Giuseppe MINIERI d'ouvrir ce congrès du 20ème anniversaire ou plus exactement d'y prononcer un discours de bienvenue.

 

J'y ai été d'autant plus sensible que l'invitation émanait d'un ami, rencontré presque jour pour jour il y a vingt ans (à deux jours près) - le 21 novembre 1986 - et dont la fidélité ne s'est jamais démentie Mais plus encore parce qu'il s'agit ici de la célébration d'un évènement presque intime pour beaucoup d'entre nous, c'est-à-dire de ce pacte scellé depuis deux décennies.

 

C'est donc, je le dis sans afféterie aucune, avec le plus grand plaisir que je me retrouve ce soir parmi vous. Aussi, je me bornerai à conjuguer amitié et brièveté, tout en m'efforçant de traiter le sujet sous l'intitulé exact qui lui a été donné dans le programme par les organisateurs: "l'Histoire de l'UAE et la relance de l'Union européenne"… Tâche difficile !

 

Ces instants sont, il est vrai, chargés d'émotion et de souvenirs.

 

Non pas parce que nous étions ici même, il y a dix ans déjà, mais bien sûr plutôt, remontant plus en arrière dans le temps, pour ce que peut évoquer ce 21 novembre, pour une partie d'entre nous, et notamment les dix-huit signataires de la liste de présence de Luxembourg (puisque nous n'étions pas à cette époque 25 fondateurs, ni même 27 membres du Comité Exécutif).

 

Je le voudrais mais je ne puis à mon grand regret les célébrer tous et je demande par avance pardon pour cette culpa in eligendo. Bien sûr, il y a les pionniers, François de BOURGEREL, Jean-Michel PEYRE, Christian ROTH, Jean- Pierre SPITZER … Bien sûr, parmi les fondateurs, il y a ceux qui ne pouvaient l'être que de droit, ceux que nous appelions, lors des congrès, les "arrêts vivants", Jean Reyners, Jean Thieffry et Onno Klopp… Mais comment les citer tous ?

 

Pour être bref, ainsi que je l'ai promis, je voudrais ici ne pas manquer à l'ardente et impérieuse obligation que me dicte la politesse du cœur. Je le ferai de façon cursive et sobre, inversement proportionnelle à la gratitude que j'éprouve pour eux.

 

Je voudrais donc remercier tout particulièrement trois personnes. De 1979 à 1986, je l'ai ai tous rencontré, un par un, pour la première fois à Luxembourg, et sans eux, je le dis, le rêve un peu fou de créer cette union que vous célébrez aujourd'hui n'aurait pu se réaliser.

 

Le premier d'entre eux, dans la chronologie, puisque s'il ne fut pas présent à la première réunion du 1er juillet 1986, c'est qu'il n'avait pas pu venir de Luxembourg à Paris, c'est Aloyse MAY.

 

Son engagement fut spontanément, constructif, indéfectible. Lui, le premier, il l'a accompli avec enthousiasme, sérénité mettant à la disposition de l'UAE naissante son cabinet tout entier, sa logistique, et la technologie émergente du début des années 1980, qui l'avait à ce point passionné, et qu'il y avait consacré comme orateur de rentrée du Barreau du Luxembourg son discours remarqué en 1984.

 

Il fut un secrétaire général parfait. Et je me dois d'ajouter que nous avons toujours travaillé en parfaite communion d'idées et que sans lui l'UAE n'aurait jamais existé. J'ai déjà raconté par ailleurs comment nous avions recopié mot pour mot ou presque les statuts d'une asbl luxembourgeoise qui s'appelait "les amis de la source", et dont le but non lucratif était de défendre les intérêts des curistes de Mondorf les bains…Je laisse là les autres anecdotes bien connues.

 

Le second, c'est une seconde, qui est la première entre toute, c'est Ioanna ANASTASSOPOULOU.

 

Notre amitié était née à Luxembourg un jour de 1982. Elle a apporté son enthousiasme communicatif, sa jeunesse et son énergie car c'est elle qui a fait en sorte que l'UAE ne soit pas qu'une simple célébration du 30ème anniversaire de la signature du traité de Rome, mais qu'elle eut des lendemains que sans elle nous n'eussions peut être pas célébré ici aujourd'hui. C'est elle qui posa les jalons du deuxième congrès à l'invitation du Barreau d'Athènes alors même que l'improbable premier congrès était à peine commencé.

 

Et elle a fait encore mieux depuis. Après Rhodes, ce fut Corfou et La Canée. "Princesse d'Europe", ai-je dit à La Canée ? Plus encore, ce fut la bonne fée des fiabe de Carlo Gozzi, celle qui a sait faire jaillir de ses doigts enchantés des joies recommencées dans des lieux qui restent pour nous riches d'expériences et de souvenirs.

 

Le troisième enfin – mais vous l'aviez déjà deviné – c'est Giuseppe MINIERI. Le 21 novembre, il était arrivé le dernier. Pèlerin de l'Europe, il était pour cette réunion, venu de Milan en voiture et en famille. Il s'était égaré dans le brouillard du Kirchberg, mais il n'a pas tardé à retrouver le bon chemin : d'abord à nous rejoindre puis à nous montrer que ultime arrivé, il pouvait être le premier.

 

C'est lui qui, avec Filippo LUBRANO, fut le maître d'œuvre du premier congrès de Rome et de tant d'autres manifestations depuis ici même ou ailleurs dans toutes les villes d'Italie, a tenu bien haut cette flamme vacillant qui ne voulait pas mourir. J'ai été heureux de lui transmettre mes pouvoirs en novembre 1989 et c'est sous a précédence que l'UAE a passé le cap des 1000 cabinets adhérents en Europe.

 

Si aujourd'hui, l'UAE peut célébrer plus d'une trentaine de volumes présentant ses travaux scientifiques, et plus de cent congrès, colloques et séminaires au cours de vingt années révolues, elle lui doit une part de gratitude.

 

A tous trois, à tous les autres, à tous ceux qui nous ont rejoints depuis, je voudrais dire ma gratitude et, si je peux me le permettre, l'étendre à tous ceux qui se sont rendus à cette manifestation, puisque je crois pouvoir dire que votre présence ici atteste un intérêt certain pour notre UAE. Je voudrais aussi saluer les présidents qui m'ont succédé au cours de ces vingt années, les Présidentes et présidents des Commissions, qui sont pour la plupart des amis chers.

 

C'était en 1986. Comment ne rappeler ce qui nous rapproche, et oublier ce qui a pu nous diviser ? A cette époque, il est vrai, nous étions jeunes et inconscients. Prêts à nous jeter dans un improbable congrès pour lequel nous n'avions pas le premier sou, pas le premier soutien.

 

Mais au-delà de l'amitié, il y avait – même si cela peut paraître prétentieux -, il y avait bien une foi commune. Bien sûr, c'était une autre époque. On en était encore à la directive prestation de services et aux trois premiers arrêts Reyners, Thieffry et Klopp, il y avait déjà l'arrêt AM & S en attendant Gullung et Gebhard ou autres arrêts Arduino, Wouters etc…

 

L'Europe en était à l'"acte unique" qui avait vu pour la première fois le citoyen pointer son nez dans le marché commun qui n'était pas encore, comme il allait le devenir au 1er janvier 1993, unique. Le traité d'Amsterdam n'avait pas encore intégré aux fondements de l'Union des droits de l'homme qui dépendaient exclusivement du Conseil de l'Europe et de la Cour de Strasbourg. Il y avait à cette époque comme un cloisonnement entre les deux Europes, celle des douze et ce qui était alors l'Europe des vingt-et-un. Ils n'étaient pas comme aujourd'hui au nombre de vingt-cinq et de quarante-six. En ce temps là, M. Bruntland n'avait pas encore inventé le "développement durable", formule appelée à un succès sémantique aujourd'hui universellement consacré.

 

Ivres de primauté, grisé d'immédiateté, pourtant nous avions une foi commune en une autre loi que la loi interne nous étions mus par la détermination de ne pas manquer d'apporter une contribution à l'essor d'un droit encore nouveau. A notre niveau, de modestes émules de Rainer Maria Rilke lorsque, la caressant en rêve, il se demandait : "Comment aurais-je pu te créer , Europe ?..."

 

Nous pensions que cette loi européenne était tout aussi et même plus respectable que les textes internes, trop souvent produits des circonstances, fruits de majorité de rencontres, ou issus d'aléas ou d'ambitions électorales. Bref, nous voulions au sens de contribuer à la création d'un état européen démocratique, c'est-à-dire, à notre échelle, créer ce que Jürgen Habermas a appelé " l'horizon d'une culture politique commune" ,bref "un contexte de communication qui déborde les frontières des espaces publics jusqu'ici limités aux cadres nationaux. » Nous ne voulions pas créer une association de plus, un de ces groupements qui demeurent trop souvent des espaces de confrontations des égoïsmes nationaux. Au contraire, nous nous défions de tous les corporatismes dont Edgar Morin a dit et écrit depuis vingt ans qu'ils avaient ralenti la construction européenne. Nous voulions aller au-delà de la seule libération des prestations de services, lorsque nous avons lancé, au début des années 90, la conférence itinérante" Quel barreau pour l'Europe ?".

 

Peut être avions nous omis de nous demander aussi "quel barreau pour quelle Europe ?" Où en sommes-nous aujourd'hui ? En 2006 ? Avons-nous connu la fin de nos espoirs ?

 

On a tout dit et écrit dans tous les sens au point que l'on a scrupule à en rajouter. Bien sur se demandera t-on longtemps comment les peuples se sont dérobées à l'instant de la construction européenne où elle finissait par se préoccuper enfin de proclamer et de protéger les droits fondamentaux de ses citoyens et de vouloir fonctionner dans leur intérêt bien compris. Etait-il déjà trop tard ?

Toutes les bonnes raisons ont été analysées, disséquées. Aucune explication moniste n'est ici de mise. Une seule et unique clef n'ouvrira jamais tant de serrures. Pourtant comme le croyait Shakespeare : "Les bonnes raisons doivent céder aux meilleures."

 

Peut être se rendra-t-on compte un jour que l'erreur – et en ce sens l'UAE a peut être suivi le mauvais exemple - de l'Europe qui, on le sait pour des raisons historiques et juridiques bien connus à négligé tant qu'il en était encore temps , c'est de ne s'être ralliée - sans doute avec une frénésie quelque peu ostentatoire - que trop tard au primat en terme d'effectivité, de ces droits que l'on appelle au gré des pays ou des traductions : droits de l'homme, droits humains ou pour reprendre l'expression de la Charte, droits fondamentaux.

 

Il y a pour tout individu, pour toute collectivité, pour toute société, un moment, non pas où il faut savoir revendiquer pour obtenir ses droits consubstantiels à l'homme, mais comprendre qu'il est possible de les obtenir.

 

Quand l'Europe a-t-elle manqué cette échéance qui va retarder d'une génération au moins son avènement, du moins tel que nous l'espérions ? Existerait-il vraiment cet instant où les portes du droit s'ouvrent enfin pour se refermer aussitôt et à jamais ?

 

Je renvoie les plus lucides d'entre vous – c'est-à-dire tous – au chapitre à la Cathédrale du procès de Kafka. Là, où un passage en forme d'apologue du dialogue entre le prêtre et K nous annonce : " Vor dem Gesetz steht ein Türhüter " Devant la loi" ou plutôt devant la porte de la loi", où se dresse un gardien, se présente un homme de sa campagne. Et l'homme de la campagne ne s'attendait pas à la présence de gardiens successifs des portes de la loi, à la carrure chaque fois plus impressionnante. La loi ne doit-elle pas être accessible à tous et toujours ? Sinon ce n'est pas la loi.

 

Relisons ce passage et gardons le présent à l'esprit.

 

Pourtant, l'homme de la campagne a accepté naïvement d'attendre jusqu'à ce qu'on lui accorde cette permission d'entrer qu'on lui refusait chaque foi. On connaît la fin de l'histoire. L'homme attendit des jours et des années. Il vieillit et s'étiola. Puis au moment de s'effondrer en un dernier soupir devant les portes de la loi qu'il n'avait jamais pu pénétrer, il fut encore assez conscient pour comprendre ce que lui disait le gardien en un murmure : " Ici, nul autre que toi ne pouvait pénétrer, car cette entrée n'était faite que pour toi. Maintenant, je m'en vais et je ferme la porte". Que chacun en fasse sa lecture et je vous renvoie à l'analyse qu'en faisait Jacques Derrida lors d'un colloque de Cerisy en 1985 intitulé "La faculté de juger". Retenons quant à nous plus prosaïquement que dès lors qu'il est question de justice et de droit, il faut savoir ne pas attendre, ou plus encore ne pas faire attendre. 

 

Oui, il était admirable de proclamer enfin les droits fondamentaux de cette Europe que je disais sans droit – à tort – parce qu'ils étaient absents de traités avaient refusé de lui en donner les compétences, les laissant ainsi indirectement à l'admirable construction jurisprudentielle des juridictions.

 

Mais leur consécration qui permettait beaucoup de choses, n'a eu lieu qu'en décembre 2000 et il était déjà trop tard. Déjà, on avait célébré le 50ème anniversaire de la déclaration universelle des droits de l'homme, déjà aussi celui de la convention européenne des droits de l'homme du 4 novembre 1950.

 

Et depuis la Conférence de Vienne en 1993, on savait alors que les droits fondamentaux étaient imprescriptibles, interdépendants, inaliénables, mais aussi et surtout universels et indivisibles de la première, de la deuxième, de la troisième génération. Que droits sociaux ou environnementaux étaient indissociables des libertés civiles ou civiques et que proclamer les dernières c'était aussi s'engager à garantir les premiers.

 

Pour admirable que soit la Charte , dans sa procédure d'élaboration comme dans son contenu, les droits sociaux individuels et collectifs, ceux des handicapés, des vieillards et des travailleurs venaient sans doute trop tard pour recevoir le crédit qu'ils justifiaient.

 

Le citoyen avait déjà par ailleurs d'autres exigences, il était habitué à d'autres exemples et aspirait à d'autres standards. Il attendait davantage de l'Europe en termes d'effectivité, il n'entendait plus les promesses.

 

Plus encore, à l'encontre de cette Europe des droits qui avait trop tardé à le reconnaître pour ce qu'il était, il était prêt à intenter un procès injuste en mettant en accusation l'Europe sans se rendre compte qu'il ne dressait que le réquisitoire de la non-Europe. Parce qu'on a trop longtemps ignoré les droits fondamentaux, ceux des travailleurs, l'Europe est donc condamnée à tout reprendre.

 

Il lui faut revenir à tout ce qu'il y a d'humain dans l'homme et dans ses relations sociales, que l'Europe n'a sans doute jamais oublié, qu'elle a maintes fois proclamée mais qu'elle n'a pas su expliquer et protéger. Sans doute Marcel Gaucher, s'est attaché à démontrer que les droits de l'homme "ne sont pas une politique", mais ils sous-tendent toute politique dans les sociétés démocratiques et ils garantissent après tout que l'on ne s'éloigne pas trop de celui qui reste la finalité de tout droit.

 

Je voudrais arrêter là, la dimension de la déception et vous inviter à croire au renouveau.

 

Georges Braque n'était pas seulement un immense peintre et pas seulement cubiste, ou un prestigieux lauréat du premier prix de peinture de la Biennale de Venezia – c'était en 1948 – l'année où s'arrête la rétrospective Picasso aujourd'hui présentée au Palazzo Grassi, -, il écrivait dans des "Cahiers" où il consignait ses pensées : "Je n'ai jamais pu discerner un commencement d'une fin".

 

C’est plus que jamais à la société civile de vouloir cette Europe incontestablement plus efficace, plus démocratique, plus sociale et plus soucieuse du citoyen.

 

Comme le croyait cet immense juriste qu'est Jhering "Aussi longtemps que le droit devra s'attendre aux attaques de l'injustice – et cela durera tant que le monde existera – il ne sera pas à l'abri de la lutte. La vie du droit est une lutte." Ce sont ces lutteurs ici réunis que je voudrais saluer en cet instant. Et je voudrais terminer en disant - au risque de paraître démodé - que, n'en doutez pas, ce que nous connaissons aujourd'hui n'est qu'un passage, et qu'il y a encore de beaux jours pour l'Europe, pour l'Europe du droit et pour l'Europe des avocats.

 

Que ceux qui n’oseraient plus se dire en faveur de l'Europe, se rassurent : votre victoire est inéluctable. La foi d'il y a vingt ans est intacte et l’Europe continuera. Avec une autre constitution, ou plus sûrement avec la même, ou encore avec les lambeaux de la même ou d'une autre. L’Europe ne nous a-t-elle pas habitués à d’autres résurgences. Célébrons aujourd'hui non pas un anniversaire mais une nouvelle naissance.

 

Comment ne pas le rappeler, ici, à Venise : lorsqu'il a voulu évoquer la fin d'une époque, (qui n'était à vrai dire que la mort de Richard Wagner), dans un monde désespéré qu'il croyait alors "diminué de valeur" et où tout semblait à jamais perdu, Gabriele d'Annunzio a vu le grand canal sous les feux crépusculaires d'un soleil d'hiver tandis que la gondole funèbre glissait sur les eaux depuis le Palais Vendramin Calergi, dans un silence que troublait à peine les arpèges des gouttes retombant des rames lors de chaque levée, mais il a aussi voulu placer en exergue son livre "Il fuoco" -le feu - cette pensée d'Héraclite d'Ephèse, qui doit être et demeurer ce qui nous réunit au plus haut point aujourd'hui : "Senza speranza e impossibile trovare l'insperato".

 

 

 

 

Bertrand FAVREAU

Texte format doc : mai  02

Texte format pdf : mai  02

 

 

 

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