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DROIT A LA NON-DISCRIMINATION

 

 

interdiction de la discrimination

L’article 14 de la Convention

INTERDICTION DE LA DISCRIMINATION – DROIT A L’INSTRUCTION -  DROIT A UN RECOURS EFFECTIF

 

La Cour souligne l’importance de la mise en place d’un système adéquat d’évaluation des aptitudes des enfants présentant des lacunes d’apprentissage en vue de leur remise à niveau, surtout s’agissant d’élèves appartenant à une minorité ethnique, afin de garantir leur placement éventuel dans des classes spéciales sur la base de critères non discriminatoires

 

SAMPANIS ET AUTRES c. GRÈCE

5.06.2008

Violation de l’article 14 combiné avec l’article 2 du Protocole n° 1, violation de l’article 13

 

Les 11 requérants sont tous des ressortissants grecs d’origine rom résidant sur l’aire de Psari près d’Aspropyrgos (Grèce).

L’affaire concerne la non-scolarisation des enfants des requérants pour l’année scolaire 2004-2005, puis leur scolarisation dans des classes spéciales situées dans un bâtiment annexe au bâtiment principal de l’école primaire d’Aspropyrgos, en raison, selon eux, de leur origine rom.

Le 21 septembre 2004, les requérants visitèrent avec d’autres parents roms les locaux des écoles primaires d’Aspropyrgos pour y faire enregistrer leurs enfants mineurs. Cette démarche avait été précédée, en août 2004, d’un communiqué de presse du ministre délégué à l’Education qui soulignait l’importance de l’intégration des enfants roms dans le processus de l’éducation nationale et, le 10 septembre 2004, d’une visite effectuée par le secrétaire du service de l’éducation des personnes d’origine grecque et de l’éducation interculturelle, accompagné de deux représentants du Moniteur grec Helsinki, aux camps des Roms à Psari dans le but d’assurer l’enregistrement de tous les enfants roms en âge de scolarisation.

Selon les requérants, les directeurs de deux écoles auraient refusé d’inscrire leurs enfants au motif qu’ils n’avaient pas reçu d’instructions à ce sujet de la part du ministère compétent. Ils les auraient informés que dès réception des instructions nécessaires, ils inviteraient les requérants à accomplir les formalités requises. Jamais par la suite les parents n’auraient été invités à inscrire leurs enfants.

Selon le gouvernement grec, les requérants se seraient simplement présentés pour recueillir des informations en vue de l’enregistrement de leurs enfants mineurs, et la directrice de la dixième école primaire d’Aspropyrgos leur aurait indiqué les documents nécessaires à cette fin. Par la suite, en novembre et décembre 2004, une délégation de professeurs des écoles primaires d’Aspropyrgos aurait rendu visite au camp des Roms à Psari afin d’informer et convaincre les parents des enfants mineurs de la nécessité d’inscrire ceux-ci, mais cette démarche serait restée sans succès, les parents concernés n’ayant pas enregistré leurs enfants pour l’année scolaire en cours.

Une réunion informelle des autorités compétentes fut convoquée par le directeur départemental de l’éducation de la région de l’Attique le 23 septembre 2004 afin de résoudre le problème de la capacité d’accueil des écoles primaires d’Aspropyrgos face aux inscriptions supplémentaires des élèves d’origine rom. Il fut décidé, d’une part, que les élèves ayant atteint l’âge de la première scolarisation seraient accueillis dans les locaux existants des écoles primaires d’Aspropyrgos, et d’autre part, que des classes supplémentaires à caractère préparatoire seraient créées pour les enfants ayant un âge supérieur à celui de la première scolarisation en vue de leur intégration dans les classes ordinaires.

Le 9 juin 2005, à l’initiative de l’Association de coordination des organisations et des communautés pour les droits de l’homme des Roms en Grèce (la SOKARDE), 23 enfants d’origine rom, dont les enfants des requérants, furent inscrits pour l’année scolaire 2005-2006. Selon le Gouvernement, ce nombre s’élèverait à 54.

En septembre et octobre 2005, dès le premier jour de l’année scolaire, des parents d’élèves non roms protestèrent contre la scolarisation des enfants d’origine rom à l’école primaire et en bloquèrent l’accès exigeant que les enfants roms fussent transférés dans un autre bâtiment. Les forces de l’ordre durent intervenir à plusieurs reprises afin de maintenir l’ordre et empêcher la commission d’actes illégaux contre les élèves d’origine rom.

Le 25 octobre 2005, les requérants signèrent, selon eux sous l’effet de pressions, une déclaration rédigée par les enseignants de l’école primaire et exprimant leur volonté de voir leurs enfants transférés dans un bâtiment distinct de l’école. Ainsi, à partir du 31 octobre 2005, les enfants des requérants furent scolarisés dans un autre bâtiment et le blocage de l’école prit fin.

Les trois classes préparatoires furent accueillies dans des salles préfabriquées installées sur un terrain dont la commune d’Apropyrgos était propriétaire. A la suite d’un incendie en avril 2007, les enfants roms furent transférés dans une nouvelle école primaire qui fut créée à Aspropyrgos en septembre 2007. Toutefois, en raison de problèmes d’infrastructure, cette école n’était pas encore opérationnelle en octobre 2007.

Invoquant l’article 14 (interdiction de la discrimination) combiné avec l’article 2 du Protocole n° 1 (droit à l’instruction), ainsi que l’article 13 (droit à un recours effectif), les requérants se plaignaient de ce que leurs enfants avaient subi une discrimination dans la jouissance de leur droit à l’instruction en raison de leur origine rom.

Décision de la Cour

Article 14 combiné avec l’article 2 du Protocole n° 1

Les requérants soutiennent que leurs enfants ont subi, sans justification objective et raisonnable, un traitement moins favorable que celui réservé aux non Roms dans une situation comparable, et que cette situation s’analyse en une discrimination contraire à la Convention.

Sur l’existence d’éléments justifiant une présomption de discrimination

La Cour observe qu’il n’est pas contesté entre les parties que les enfants des requérants ont manqué l’année scolaire 2004-2005 et que des classes préparatoires ont été créées au sein de l’une des écoles primaires d’Aspropyrgos.

Elle note que la création des trois classes préparatoires en cause n’a été prévue qu’en 2005, lorsque les autorités locales se sont trouvées confrontées à la question de la scolarisation des enfants d’origine rom résidant au camp de Psari. Le Gouvernement ne donne aucun exemple, antérieur aux faits de la cause, de création de classes spéciales au sein des écoles primaires d’Aspropyrgos, alors que d’autres enfants d’origine rom y furent inscrits dans le passé.

De surcroît, concernant la composition des classes préparatoires, la Cour remarque que celles-ci étaient fréquentées exclusivement par des élèves d’origine rom.

La Cour note que bien que les incidents de caractère raciste ayant eu lieu devant l’école primaire d’Aspropyrgos en septembre et octobre 2005 ne peuvent pas être imputés aux autorités grecques, cela n’empêche pas de supposer que ceux-ci ont pesé sur la décision de placer les élèves d’origine rom dans une annexe de l’école primaire.

La Cour estime que les éléments de preuve présentés par les requérants et ceux figurant au dossier peuvent être considérés comme suffisamment fiables et révélateurs pour faire naître une forte présomption de discrimination et qu’il appartient donc au Gouvernement de démontrer que cette différence de traitement était le résultat de facteurs objectifs qui n’étaient pas liés à l’origine ethnique des personnes concernées.

Sur l’existence d’une justification objective et raisonnable

La Cour observe qu’il ne ressort pas des pièces du dossier que les requérants aient essuyé un refus explicite de la part des autorités de l’école d’Aspropyrgos d’enregistrer leurs enfants pour l’année scolaire 2004-2005.

La Cour estime cependant que, même à admettre que les requérants aient simplement cherché à obtenir des informations sur les conditions d’enregistrement de leurs enfants à l’école primaire, il est incontestable qu’ils ont explicitement manifesté à l’autorité scolaire compétente leur volonté de scolariser leurs enfants. Etant donné la vulnérabilité des Roms, qui implique la nécessité d’accorder une attention spéciale à leurs besoins, et le fait que l’article 14 exige dans certaines circonstances un traitement différencié pour corriger une inégalité, les autorités compétentes auraient dû reconnaître la particularité du cas d’espèce et faciliter l’inscription des enfants d’origine rom, même dans les cas où certains des documents administratifs requis auraient fait défaut. La Cour note sur ce point que le droit grec reconnaît la particularité de la situation des Roms, en facilitant la procédure d’inscription de leurs enfants à l’école. De surcroît, la législation interne prévoit la possibilité d’une inscription d’élèves à l’école primaire sur simple déclaration de ceux qui exercent l’autorité parentale, sous réserve que soient soumis en temps utile les certificats de naissance.

Cette obligation pesant sur les autorités scolaires d’Aspropyrgos était d’autant plus évidente que celles-ci étaient conscientes du problème de scolarisation des enfants résidant au camp de Psari et de la nécessité de procéder à leur enregistrement à l’école primaire.

S’agissant des classes spéciales, la Cour estime que les autorités compétentes ne se sont pas fondées sur un critère unique et clair pour choisir les enfants à affecter aux classes préparatoires. En effet, le Gouvernement ne fait aucunement état de tests adéquats auxquels les enfants concernés auraient été soumis aux fins d’évaluation de leurs aptitudes ou de leurs difficultés éventuelles d’apprentissage.

En outre, la Cour note que l’objectif affiché des classes préparatoires était que les élèves concernés se retrouvent à niveau pour intégrer en temps utile les classes ordinaires. Or le Gouvernement ne cite aucun exemple d’élève qui, après avoir été placé dans une classe préparatoire – il y en eut ainsi plus de 50 – aurait, après l’écoulement de deux années scolaires, intégré les classes ordinaires de l’école primaire d’Aspropyrgos. De surcroît, il ne fait pas état de tests d’évaluation auxquels les élèves d’origine rom auraient dû être périodiquement soumis pour permettre aux autorités scolaires d’apprécier, sur la base de données objectives et non pas d’évaluations approximatives, leur aptitude à intégrer les classes ordinaires.

La Cour souligne l’importance de la mise en place d’un système adéquat d’évaluation des aptitudes des enfants présentant des lacunes d’apprentissage en vue de leur remise à niveau, surtout s’agissant d’élèves appartenant à une minorité ethnique, afin de garantir leur placement éventuel dans des classes spéciales sur la base de critères non discriminatoires. En outre, étant donné les incidents racistes provoqués par les parents des élèves non roms, l’instauration d’un tel système aurait fait naître chez les requérants le sentiment que le placement de leurs enfants dans des classes préparatoires n’était pas inspiré par des motifs ségrégatifs. Tout en admettant qu’il ne lui appartient pas de se prononcer sur cette question de nature psychopédagogique, la Cour estime que cela aurait particulièrement contribué à l’intégration des élèves d’origine rom non seulement dans les classes ordinaires, mais également dans la société locale.

Par ailleurs, la Cour n’est pas convaincue que les intéressés, en tant que membres d’une communauté défavorisée et souvent sans instruction, fussent capables d’évaluer tous les aspects de la situation et les conséquences de leur consentement au transfert de leurs enfants dans un bâtiment distinct.

Rappelant l’importance fondamentale de la prohibition de la discrimination raciale, la Cour considère que l’on ne peut admettre la possibilité de renoncer au droit de ne pas faire l’objet d’une telle discrimination. En effet, pareille renonciation se heurterait à un intérêt public important.

La Cour conclut qu’en dépit de la volonté des autorités de scolariser les enfants roms, les modalités d’enregistrement des enfants en cause à l’école et leur affectation dans des classes préparatoires spéciales – accueillies dans une annexe au bâtiment principal de l'école – ont en définitive eu pour résultat de les discriminer. Partant, il y a eu violation de l’article 14 de la Convention combiné avec l’article 2 du Protocole no 1 dans le chef de chacun des requérants.

Article 13

La Cour estime que le gouvernement grec n’a fait état d’aucun recours effectif que les requérants auraient pu exercer afin d’obtenir le redressement de la violation alléguée au titre de l’article 14 de la Convention combiné avec l’article 2 du Protocole n° 1. Partant, il y a eu violation de l’article 13.

La Cour conclut, à l’unanimité :

·     - à la violation de l’article 14 (interdiction de la discrimination) de la Convention combiné avec l’article 2 du Protocole n° 1 (droit à l’instruction), du fait de la non-scolarisation des enfants des requérants, puis de leur scolarisation dans des classes spéciales, en raison de leur origine rom ; et,

·      - à la violation de l’article 13 (droit à un recours effectif) de la Convention européenne des droits de l’homme.

En application de l’article 41 (satisfaction équitable) de la Convention, la Cour alloue à chacun des requérants 6 000 euros (EUR) pour préjudice moral et aux requérants conjointement 2 000 EUR pour frais et dépens. (L’arrêt n’existe qu’en français.)

 

Sampanis et Autres c. GRECE 5 juin 2008 Jurisprudence antérieure :  Chapman c. Royaume-Uni [GC], no 27238/95, § 96, CEDH 2001-I ; Chassagnou et autres c. France [GC], nos 25088/94, 28331/95 et 28443/95, §§ 91-92, CEDH 1999-III ; Connors c. Royaume-Uni, no 66746/01, § 84, 27 mai 2004 ; D.H. et autres c. République tchèque [GC], no 57325/00, §§ 175, 176 et 196, CEDH 2007 ; Dalia c. France, arrêt du 19 février 1998, Recueil des arrêts et décisions 1998-I, p. 87, § 38 ; Deweer c. Belgique, arrêt du 27 février 1980, série A no 35, § 51 ; Famille H. c. Royaume-Uni, no 10233/83, décision de la Commission du 6 mars 1984, Décisions et rapports (DR) 37, p. 109 ; Fressoz et Roire c. France [GC], no 29183/95, § 37, CEDH 1999-I ; Gaygusuz c. Autriche, arrêt du 16 septembre 1996, Recueil 1996-IV, § 42 ; Hassan et Tchaouch c. Bulgarie [GC], no 30985/96, §§ 96-98, CEDH 2000-XI ; Hoogendijk c. Pays-Bas (déc.), no 58461/00, 6 janvier 2005 ; Hugh Jordan c. Royaume-Uni, no 24746/94, § 154, 4 mai 2001 ; Konrad et autres c. Allemagne (déc.), no 35504/030, 11 septembre 2006 ; Kudla c. Pologne [GC], no 30210/96, § 152, CEDH 2000-XI ; Larkos c. Chypre [GC], no 29515/95, § 29, CEDH 1999-I ; Manoussakis et autres c. Grèce, arrêt du 26 septembre 1996, Recueil 1996-IV, § 33 ; Natchova et autres c. Bulgarie [GC], nos 43577/98 et 43579/98, § 145, CEDH 2005 ; Pfeifer et Plankl c. Autriche, arrêt du 25 février 1992, série A no 227, pp.16-17, §§ 37-38 ; Soto Sanchez c. Espagne, no 66990/01, § 34, 25 novembre 2003 ; Stec et autres c. Royaume-Uni [GC], no 65731/01, § 51, CEDH 2006-VI ; Thlimmenos c. Grèce [GC], no 34369/97, § 44, CEDH 2000-IV ; Timichev c. Russie, nos 55762/00 et 55974/00, § 56, CEDH 2005 ; Willis c. Royaume-Uni, no 36042/97, § 48, CEDH 2002-IV ; Zarb Adami c. Malte, no 17209/02, § 76, CEDH 2006 Sources externes : Recommandation no R (2000) 4 du Comité des Ministres aux Etats membres sur l'éducation des enfants roms/tsiganes en Europe (adoptée par le Comité des Ministres le 3 février 2000, lors de la 696e réunion des Délégués des Ministres) ; Recommandation de l'Assemblée Parlementaire no 1203 (1993) relative aux Tsiganes en Europe ; Recommandation de l'Assemblée Parlementaire no 1557 (2002) relative à la situation juridique des Roms en Europe ; Recommandation de politique générale no 3 de la Commission européenne contre le racisme et l'intolérance (ECRI) : La lutte contre le racisme et l'intolérance envers les Roms/Tsiganes (adoptée par l'ECRI le 6 mars 1998) ; Recommandation de politique générale no 7 de l'ECRI sur la législation nationale pour lutter contre le racisme et la discrimination raciale (adoptée par l'ECRI le 13 décembre 2002) ; Rapport de l'ECRI sur la Grèce rendu public le 8 juin 2004 ; Rapport final de M. Alvaro Gil-Robles sur la situation en matière de droits de l'homme des Roms, Sintis et Gens du voyage en Europe (daté du 15 février 2006)

 

Plutôt que la durée ou le caractère solidaire de la relation, l’élément déterminant est l’existence d’un engagement public, qui va de pair avec un ensemble de droits et d’obligations d’ordre contractuel, l’absence d’un tel accord juridiquement contraignant entre les requérantes fait que leur relation de cohabitation, malgré sa longue durée, est fondamentalement différente de celle qui existe entre deux conjoints ou partenaires civils

 

ARRÊT DE GRANDE CHAMBRE 
BURDEN c. Royaume-Uni

29.04.2008

Non violation de l’article 14

 

Joyce et Sybil Burden, deux ressortissantes britanniques nées en 1918 et 1925 respectivement, sont des sœurs célibataires résidant à Marlborough (Royaume-Uni).

Les requérantes ont vécu ensemble toute leur vie. Depuis 30 ans, elles habitent dans une maison construite sur un terrain hérité de leurs parents. Chacune a rédigé un testament en vertu duquel elle lègue à sa sœur l’ensemble de son patrimoine.

Toutes deux octogénaires, elles craignent que, au décès de l’une, l’autre soit contrainte de vendre la maison pour pouvoir s’acquitter des droits de succession. D’après la loi de 1984 sur les droits de succession, les droits à payer représentent 40 % de la valeur des biens du défunt. Ce taux s’applique à tout montant supérieur à 285 000 livres sterling (GBP) (420 844 euros (EUR)) pour les transmissions intervenant durant l’exercice fiscal 2006-2007 et à 300 000 GBP (442 994 EUR) pour 2007-2008.

Sont actuellement exonérés les biens transmis du défunt à son conjoint ou à son « partenaire civil » (catégorie instaurée par la loi de 2004 sur le partenariat civil, qui vise les couples dont les deux partenaires sont de même sexe, mais non les membres d’une même famille qui vivent ensemble).

La requête a été introduite devant la Cour le 29 mars 2005. Une audience sur la recevabilité et le fond s’est déroulée en public au Palais des droits de l’homme, à Strasbourg, le 12 septembre 2006.

Par un arrêt de chambre du 12 décembre 2006, la Cour avait conclu, par quatre voix contre trois, à la non-violation de l’article 14 combiné avec l’article 1 du Protocole n° 1.

Le 8 mars 2007, les requérantes ont demandé le renvoi de l’affaire devant la Grande Chambre conformément à l’article 432 de la Convention (renvoi devant la Grande Chambre). Le 23 mai 2007, le collège de la Grande Chambre a accepté ladite demande.

Les requérantes se plaignaient du fait que, lorsque l’une d’elles viendrait à décéder, la survivante aurait à acquitter de lourds droits de succession, contrairement au survivant dans un couple marié ou un partenariat civil. Elles invoquaient l’article 1 du Protocole n1, combiné avec l’article 14.

 

Décision de la Cour

Sur la question de savoir si les requérantes peuvent se prétendre victimes d’une violation de la Convention

La Grande Chambre estime comme la chambre que, compte tenu de leur âge, des testaments rédigés par elles et de la valeur des biens possédés par chacune, les requérantes ont établi l’existence d’un risque réel de voir, dans un futur qui n’est guère lointain, l’une d’elles obligée d’acquitter d’importants droits de succession sur les biens hérités de sa sœur. Dans ces conditions, les intéressées peuvent se prétendre victimes du traitement discriminatoire allégué.

Sur l’épuisement des voies de recours internes

La Grande Chambre rejette l’argument du gouvernement britannique selon lequel les requérantes n’ont pas épuisé les voies de recours internes qui étaient à leur disposition. D’après le Gouvernement, les requérantes auraient pu en vertu de la loi sur les droits de l’homme saisir la justice d’une demande tendant à l’obtention d’une déclaration d’incompatibilité de la législation en question avec la Convention, ce qui aurait donné au ministre compétent le pouvoir discrétionnaire de prendre des mesures aux fins de modifier la disposition légale litigieuse, soit par le biais d’une ordonnance correctrice, soit par la présentation d’un projet de loi devant le Parlement. Comme la chambre, la Grande Chambre estime qu’on ne peut exclure qu’à l’avenir la pratique consistant à modifier la législation à la suite d’une déclaration d’incompatibilité avec la Convention puisse être considérée comme une obligation contraignante. A ce moment-là, sauf dans les cas où un recours effectif nécessiterait l’octroi d’une indemnité, les requérants devraient d’abord exercer ce recours avant de saisir la Cour. Dès lors toutefois que tel n’est pas encore le cas, la Grande Chambre estime que les requérantes n’ont pas négligé d’épuiser les voies de recours internes.

Article 14 combiné avec l’article 1 du Protocole n° 1

La Grande Chambre fait remarquer que la relation entre frères et sœurs est différente par nature de celle qui lie deux conjoints ou deux partenaires civils homosexuels en vertu de la loi britannique sur le partenariat civil. L’une des caractéristiques définissant le mariage ou l’union fondée sur la loi sur le partenariat civil tient à ce que ces formes d’union sont interdites aux personnes qui ont des liens de proche parenté. Le fait que les requérantes aient choisi de passer ensemble toute leur vie d’adultes ne change rien à cette différence essentielle entre les deux types de relations.

Par ailleurs, la Grande Chambre fait observer qu’elle a déjà déclaré que le mariage confère un statut particulier à ceux qui s’y engagent. L’exercice du droit de se marier est protégé par l’article 12 de la Convention et emporte des conséquences sociales, personnelles et juridiques.

Depuis l’entrée en vigueur de la loi sur le partenariat civil au Royaume-Uni, un couple homosexuel a désormais également la possibilité de s’engager dans une relation juridique conçue par le Parlement pour correspondre dans toute la mesure du possible au mariage. La Grande Chambre estime que, comme pour le mariage, les conséquences juridiques du partenariat civil fondé sur la loi de 2004 – dans lequel deux personnes décident expressément et délibérément de s’engager – distinguent ce type de relation des autres formes de vie commune. Plutôt que la durée ou le caractère solidaire de la relation, l’élément déterminant est l’existence d’un engagement public, qui va de pair avec un ensemble de droits et d’obligations d’ordre contractuel. De la même manière qu’il ne peut y avoir d’analogie entre, d’un côté, un couple marié ou en partenariat civil et, de l’autre, un couple hétérosexuel ou homosexuel dont les deux membres ont choisi de vivre ensemble sans devenir des époux ou des partenaires civils, l’absence d’un tel accord juridiquement contraignant entre les requérantes fait que leur relation de cohabitation, malgré sa longue durée, est fondamentalement différente de celle qui existe entre deux conjoints ou partenaires civils.

Ne change rien à cette position le fait que les 47 Etats européens membres du Conseil de l’Europe ont adopté différentes règles en matière successorale4. De même, les Etats ont défini différentes politiques concernant l’octroi d’exonérations de droits de succession aux diverses catégories de survivants, les Etats demeurant en principe libres d’élaborer différentes règles en matière fiscale.

La Grande Chambre conclut que les requérantes, en tant que sœurs vivant ensemble, ne sauraient être comparées à des conjoints ou partenaires civils aux fins de l’article 14. Il s’ensuit qu’il n’y a pas eu discrimination, ni dès lors violation de l’article 14 combiné avec l’article 1 du Protocole no 1.

La Cour conclut, par 15 voix contre deux, à la non-violation de l’article 14 (interdiction de la discrimination) de la Convention combiné avec l’article 1 du Protocole n° 1 (protection de la propriété) à la Convention.

 

Burden c. Royaume Uni 29 avril 2008 Les juges Bratza et Björgvinsson ont exprimé des opinions concordantes et les juges Zupančič et Borrego Borrego ont exprimé des opinions dissidentes

Jurisprudence antérieure : Akdivar et autres c. Turquie, arrêt du 16 septembre 1996, Recueil 1996-IV, §§ 65-66 ; Bowman c. Royaume-Uni, no 24839/94, Recueil 1998-I ; Campbell et Cosans c. Royaume-Uni,arrêt du 25 février 1982, série A no 48 ; D.H. et autres c. République tchèque [GC], no 57325/00, § 175, CEDH 2007 ; Eckle c. Allemagne, arrêt du 15 juillet 1982, série A no 51, § 66 ; Inze c. Autriche,arrêt du 28 octobre 1987, série A no 126 ; Irlande c. Royaume-Uni, arrêt du 18 janvier 1978, série A no 25, §§ 239-240 ; Johnston et autres c. Irlande, arrêt du 18 décembre 1986, § 42, série A n° 112 ; Klass et autres c. Allemagne, arrêt du 6 septembre 1978, série A no 28, § 33 ; Marckx c. Belgique,arrêt du 13 juin 1979, série A no 31 ; Norris c. Irlande, arrêt du 26 octobre 1988, § 31, série A no 142 ; Open Door et Dublin Well Woman c. Irlande, arrêt du 29 octobre 1992, série A no 246-A ; Orion-Breclav, SRO c. République tchèque (déc.), no 43783/98, 13 janvier 2004 ; Stec et autres c. Royaume-Uni (déc.) [GC], nos 65731/01 et 65900/01, § 39, CEDH 2005-X ; Stec et autres c. Royaume-Uni [GC], nos 65731/01 et 65900/01, §§ 51-52, CEDH 2006-VI ; Upton c. Royaume-Uni (déc.), no 29800/04, 11 avril 2006 ; Willis c. Royaume-Uni, no 36042/97, CEDH 2002-IV(L’arrêt existe en français et en anglais.)

DISCRIMINATION OBLIGATIONS POSITIVES RACE RECOURS EFFECTIF TRAITEMENT DEGRADANT

STOICA c. ROUMANIE

n° 42722/02

04/03/2008

 

 Le requérant allègue que des policiers lui ont infligé de mauvais traitements le 3 avril 2001 et que l’enquête menée ultérieurement sur l’incident était inadéquate. Il se plaint également que les mauvais traitements et la décision de ne pas poursuivre le policier qui l’avait battu était motivée par des préjugés raciaux. Il se plaint en outre de n’avoir pas eu la possibilité de faire appel de cette décision et d’avoir donc été dans l’impossibilité de demander des dommages-intérêts devant les tribunaux civils. Il invoque en particulier les articles 3 (interdiction de traitements inhumains ou dégradants), 13 (droit à un recours effectif) et 14 (interdiction de la discrimination).

Article 3

La Cour relève que les allégations du requérant sont cohérentes et corroborées par le rapport médical établi après l’incident. En outre, ce rapport médical certifie que les blessures du requérant étaient suffisamment graves pour s’analyser en de mauvais traitements au sens de l’article 3. La Cour rappelle que, si un individu allègue de manière défendable avoir été gravement maltraité par la police, une enquête officielle effective de nature à conduire à l’identification et à la punition des responsables est requise.

La Cour estime que la durée de l’enquête, à savoir un an, ne pose pas problème. Toutefois, elle estime que l’effectivité de cette enquête est sujette à caution.

Premièrement, alors que 20 à 30 villageois étaient présents durant l’incident, seuls trois d’entre eux ont été entendus par la police de Suceava et cinq par le procureur militaire. En revanche, tous les policiers et agents de sécurité ont fait des dépositions. Aucune explication n’a été donnée quant à savoir pourquoi les autres villageois n’ont pas déposé pendant l’enquête. Soit ils n’ont pas été convoqués, soit, comme le soutient le requérant, ils ont été victimes d’actes d’intimidation. Quoi qu’il en soit, le fait qu’ils n’aient pas été entendus laisse place au doute quant au caractère approfondi de l’enquête de police.

Deuxièmement, la Cour rappelle qu’en vertu du droit applicable à l’époque des faits l’indépendance hiérarchique et institutionnelle du procureur militaire était sujette à caution. En effet, le procureur n’a pas expliqué pourquoi les dépositions des villageois seraient moins crédibles que celles des policiers : toutes les personnes impliquées pouvaient passer pour manquer d’objectivité. De plus, sa conclusion, selon laquelle ces villageois n’étaient pas présents pendant l’incident, est contredite par les éléments du dossier. En outre, le procureur n’a fait qu’examiner brièvement les différences dans les versions concernant les coups reçus par le requérant, sans se pencher sur les points communs dans les dépositions, notamment ceux qui donnaient à penser que le requérant avait subi des blessures sur tout le corps.

Troisièmement, le fait que les policiers n’aient pas évoqué le comportement prétendument insultant des Roms jette le doute sur leur version des faits.

Enfin, les enquêteurs se sont limités à exonérer les policiers de toute responsabilité et n’ont pas identifié les responsables des blessures du requérant, ce qui constitue une sérieuse lacune étant donné que le requérant était mineur à l’époque des faits et gravement handicapé.

Eu égard à ces carences, la Cour estime que les autorités roumaines ont failli à mener une enquête convenable sur les allégations du requérant concernant les mauvais traitements subis par celui-ci, en violation de l’article 3. La Cour estime donc également que la Roumanie n’a pas établi de façon satisfaisante que les blessures du requérant avaient une autre cause que le traitement infligé par les policiers, et conclut que les blessures de l’intéressé ont résulté d’un traitement inhumain et dégradant contraire à l’article 3.

Article 13

Eu égard à sa conclusion sous l’angle de l’article 3 concernant l’absence d’enquête effective, la Cour juge inutile d’aboutir à un constat séparé sur le terrain de l’article 13, pris isolément ou combiné avec l’article 14. Toutefois, elle estime qu’une question séparée se pose au titre de l’article 13 en ce que le requérant s’est plaint qu’il ne pouvait pas faire appel contre la décision du procureur de ne pas engager de poursuites pénales.

La Cour relève que la loi n° 281/2003 qui a modifié le Code de procédure pénale a donné au requérant la possibilité de faire appel d’une décision du procureur prise avant l’entrée en vigueur de cette loi et estime donc que l’intéressé aurait dû contester la décision du procureur concernant son affaire après l’entrée en vigueur de la loi. Dès lors, elle juge qu’il n’y a pas eu violation de l’article 13.

Article 14 combiné avec l’article 3

La Cour estime que le procureur militaire et la police ont ignoré les preuves de discrimination et que l’enquête a été entachée de préjugés raciaux. En particulier, elle est préoccupée par la facilité avec laquelle le préfet a conclu que l’incident du 3 avril 2001 n’avait pas de motivation raciste. Le procureur militaire est arrivé à la même conclusion, fondée seulement sur l’appréciation de l’incident par C.C. et les policiers. En outre, le procureur a seulement estimé que les villageois, principalement des Roms, manquaient d’objectivité dans leurs déclarations, alors qu’il a pleinement intégré les dépositions des policiers dans son raisonnement et ses conclusions. De même, il ne s’est pas préoccupé de la remarque stéréotypée formulée dans le rapport de la police de Suceava qui avait décrit le comportement prétendument agressif des villageois comme étant « purement gitan ».

Eu égard à cette conclusion, la Cour estime qu’il était de la responsabilité du gouvernement de prouver que l’incident du 3 avril 2001ne se fondait pas sur des motivations racistes.

Or, l’incident, tel que décrit par les villageois et, dans une certaine mesure, tel que rapporté par les policiers, n’était pas dénué de connotations raciales. Notamment, on aurait demandé à F.L. s’il était « gitan ou roumain » et, à la demande du maire adjoint, il a été battu pour donner aux Roms « une leçon ». De même, la dispute de C.C. avec le maire adjoint avait à la base des éléments racistes. La remarque sur le comportement « purement gitan » contenue dans le rapport de la police de Suceava est une preuve de plus que les policiers n’ont pas eu une attitude neutre sur le plan racial, que ce soit pendant l’incident ou tout au long de l’enquête.

La Cour ne voit aucune raison de considérer que l’agression du requérant par les policiers ne s’inscrivait pas dans ce contexte raciste. Ni le procureur en charge de l’enquête pénale ni le gouvernement n’ont avancé un quelconque argument démontrant que l’incident n’a eu aucune connotation raciale. Au contraire, les preuves indiquent que le comportement des policiers avait clairement une motivation raciste. En conséquence, il y a eu violation de l’article 14 combiné avec l’article 3.

 

Stoica c. Roumanie (requête no 42722/02).Violation de l'art. 3 ; Non-violation de l'art. 13 ; Violation de l'art. 14+3 ; Partiellement irrecevable ; Préjudice moral - réparation ; Dommage matériel - demande rejetée Jurisprudence antérieure :  A. c. Royaume-Uni, arrêt du 23 septembre 1998, Recueil 1998-VI, p. 2699, § 21 ; Akdivar et autres c. Turquie arrêt du 16 septembre 1996, Recueil 1996-IV, p. 1210, § 65 ; Aksoy c. Turquie arrêt du 18 décembre 1996, Recueil 1996-VI, §§ 51, 95 ; Assenov et autres c. Bulgarie, arrêt du 28 octobre 1998, Recueil 1998-VIII, §§ 93, 102 ; Avsar c. Turquie, n° 25657/94, § 282, CEDH 2001 ; Aydin c. Turquie, arrêt du 25 septembre 1997, Recueil 1997-VI, pp. 1895-96, § 103 ; Barbu Anghelescu c. Roumanie (n° 46430/99, §§ 30-40, 70, 5 octobre 2004 ; Baumann c. France, no 33592/96, 22 mai 2001, § 47 ; Bekos et Koutropoulos c. Grèce, n° 15250/02, § 65, CEDH 2005 XIII (extraits) ; Boicenco c. Moldova, n° 41088/05, § 176, 11 juillet 2006 ; Boyle et Rice c. Royaume-Uni, arrêt du 27 avril 1988, série A n° 131, § 52 ; Brusco c. Italie ((déc.), n° 69789/01, CEDH 2001 IX ; Bursuc c. Roumanie, n° 42066/98, §§ 103, 104, 107, 12 octobre 2004 ; Charzynski c. Pologne (déc.), n° 15212/03, §§ 40 41, CEDH 2005 V ; Cobzaru c. Roumanie, n° 48254/99, §§ 44-52, 65, 74, 75, 26 juillet 2007 ; Corsacov c. Moldova, n° 18944/02, § 82, 4 avril 2006 ; Dumitru Popescu c. Roumanie ((n° 1), n° 49234/99, §§ 43-46, 56, 74-78, 26 avril 2007 ; Içyer c. Turquie (déc.), n° 18888/02, §§ 83 84, CEDH 2006 I ; Irlande c. Royaume-Uni, arrêt du 18 janvier 1978, série A n° 25, p. 65, § 162 ; Ismaïlov c. Azerbaïdjan, n° 4439/04, § 38, 17 janvier 2008 ; Kalanyos et autres c. Roumanie (déc.), n° 57884/00, 19 mai 2005 ; Kaya c. Turquie, arrêt du 19 février 1998, Recueil 1998-I, pp. 329-30, § 106 ; Klaas c. Allemagne, arrêt du 22 septembre 1993, série A n° 269, p. 17, § 29 ; Kudla c. Pologne [GC], n° 30210/96, §§ 91, 92, CEDH 2000-XI ; McKerr c. Royaume-Uni (déc.), n° 28883/95, 4 avril 2000 ; Menecheva c. Russie, n° 59261/00, § 76, 9 mars 2006 ; Moldovan et autres (n° 2), nos. 41138/98 et 64320/01, § 120, CEDH 2005 VII (extraits) ; Natchova et autres c. Bulgarie [GC], nos. 43577/98 et 43579/98, §§ 145, 157, 160, CEDH 2005-VII ; Nilsen et Johnsen c. Norvège [GC], n° 23118/93, § 62, CEDH 1999-VIII ; Nogolica c. Croatie (déc.), n° 77784/01, CEDH 2002 VIII ; Peers c. Grèce, n° 28524/95, §§ 67, 74, CEDH 2001-III ; Raninen c. Finlande, arrêt du 16 décembre 1997, Recueil 1997-VIII, pp. 2821, § 55 ; Ribitsch c. Autriche, arrêt du 4 décembre 1995, série A n° 336, p. 24, §§ 13, 32, 39 ; Rupa c. Roumanie (déc.), n° 58478/00, 14 décembre 2004 ; Šecic c. Croatie n° 40116/02, §§ 61, 66, 67, CEDH 2007 ... ; Selmouni c. France [GC], n° 25803/94, § 74, CEDH 1999-IV ; Van Oosterwijck c. Belgique, arrêt du 6 novembre 1980, série A n° 40, pp. 18-19, § 37 ; Velikova c. Bulgarie, n° 41488/98, § 80, CEDH 2000 VI ; Willis c. Royaume-Uni, n° 36042/97, § 48, CEDH 2002-IV

 

 

DISCRIMINATION ENVERS LES ROMS

Dans le domaine de l’enseignement, on ne saurait interdire aux Etats de créer des classes spéciales ou des écoles distinctes destinées aux enfants en difficulté ou de mettre en œuvre des programmes éducatifs spécifiques répondant à des besoins particuliers.

Le placement dans des classes spéciales apparaît comme une mesure positive destinée à les aider à acquérir les connaissances requises pour pouvoir suivre le programme scolaire

 

ORŠUŠ ET AUTRES c. CROATIE

17/07/2008

Non violation de l’article 2 du protocole n°1 combiné avec l’article 14

 

Les requérants alléguaient avoir été placés à l’école primaire dans des classes composées exclusivement de Roms. Ils alléguaient que celles-ci dispensaient aux Roms un enseignement dont le contenu était réduit de 30 % par rapport au programme national officiel, situation qui s’analysait selon eux en une discrimination raciale et emportait violation de leur droit à l’instruction et à ne pas subir de traitement inhumain ou dégradant.

Les intéressés alléguaient que leur placement dans des classes réservées aux Roms les avait privés de leur droit d’être éduqués dans un environnement multiculturel et leur avait causé un grave préjudice éducatif, psychologique et émotionnel se traduisant notamment par un sentiment d’aliénation et une perte d’estime de soi. Ils dénonçaient aussi la durée excessive de la procédure.

Article 3

La Cour estime que les arguments des requérants sont trop généraux et qu’ils sont fondés sur des spéculations. Rien n’indique que les autorités aient eu l’intention d’humilier ou de rabaisser les intéressés ou qu’elles aient porté atteinte à leur dignité humaine en les plaçant, pendant une certaine période de leur scolarité primaire, dans des classes réservées aux Roms. En réalité, neuf des requérants ont fréquenté tant ce type de classe que des classes mixtes. Par ailleurs, les cinq autres requérants n’ont pas apporté la preuve des préjudices qu’ils disaient avoir subis du fait de la fréquentation de classes exclusivement composées de Roms. Enfin, en proposant à l’ensemble des élèves de pratiquer des activités périscolaires dans le cadre de groupes mixtes, les écoles mises en cause se sont efforcées de favoriser les rencontres entre les enfants rom et les autres élèves en dehors du contexte scolaire.

Dans ces conditions, la Cour estime qu’il n’est pas établi que les requérants aient fait l’objet d’un mauvais traitement atteignant le degré de gravité requis pour tomber sous le coup de l’article 3. Partant, elle déclare ce grief irrecevable.

Article 2 du Protocole no 1 pris isolément

La Cour observe d’abord que l’enseignement donné aux requérants n’était pas de moindre qualité que celui imparti aux autres élèves de leurs écoles respectives. Il a été établi dans le cadre de la procédure interne que le programme suivi dans les classes réservées aux Roms était identique à celui des autres classes. Dans les observations qu’ils ont soumises à la Cour, les intéressés n’ont pas fourni d’éléments suffisants à l’appui de leur allégation selon laquelle le programme suivi dans les classes réservées aux Roms comportait jusqu’à 30 % d’enseignements en moins que celui des autres classes.

Par ailleurs, le transfert d’élèves d’une classe réservée aux Roms à une classe mixte était chose courante dans les écoles mises en cause, comme en atteste l’expérience vécue par les neuf premiers requérants. Les intéressés n’ont jamais demandé leur transfert dans une classe mixte ou contesté leur placement dans une classe réservée aux Roms.

En outre, les parents des intéressés n’ont pas été privés et ne se sont pas plaints d’avoir été privés du droit qu’ils tirent de l’article 2 du Protocole no 1 « d’éclairer et conseiller leurs enfants, d’exercer envers eux leurs fonctions naturelles d’éducateurs, de les orienter dans une direction conforme à leurs propres convictions religieuses ou philosophiques ».

Dans ces conditions, la Cour juge que les requérants n’ont pas été privés de leur droit de fréquenter une école et de recevoir une instruction. Elle conclut au caractère adéquat et suffisant de l’instruction en question. Partant, l’article 2 du Protocole no 1 n’a pas été violé.

Article 14 combiné avec l’article 2 du Protocole no 1

La Cour observe que les différences de traitement dont les requérants se plaignaient étaient fondées sur leurs compétences linguistiques. Or ceux-ci n’ont jamais contesté qu’ils ne maîtrisaient pas suffisamment la langue croate pour pouvoir suivre une scolarité au moment où ils se sont inscrits à l’école primaire. En outre, le Gouvernement a indiqué que des tests linguistiques avaient révélé que la majorité des enfants rom qui vivaient dans les zones concernées avaient une connaissance insuffisante de la langue croate. La Cour estime qu’il s’agit là d’un problème dont les autorités internes compétentes devaient s’occuper. En tout état de cause, la pratique consistant à placer les enfants rom dans des classes spéciales n’existe que dans quatre écoles primaires d’une seule région de Croatie, où les élèves rom sont particulièrement nombreux. Par ailleurs, il ressort des statistiques fournies par le Gouvernement que les écoles en question n’ont pas pour politique générale de regrouper systématiquement les enfants rom dans des classes spéciales.

La Cour rappelle que, dans le domaine de l’enseignement, on ne saurait interdire aux Etats de créer des classes spéciales ou des écoles distinctes destinées aux enfants en difficulté ou de mettre en œuvre des programmes éducatifs spécifiques répondant à des besoins particuliers. Au contraire, il est louable pour les autorités de s’être occupées de ce délicat et important problème. Le placement des requérants dans des classes spéciales apparaît comme une mesure positive destinée à les aider à acquérir les connaissances requises pour pouvoir suivre le programme scolaire.

La Cour conclut que les requérants ont été initialement placés dans des classes spéciales parce qu’ils ne maîtrisaient pas suffisamment la langue croate et non en raison de leur race ou de leur origine ethnique. En conséquence, il n’y a pas eu violation de l’article 14 de la Convention combiné avec l’article 2 du Protocole no 1.

Article 6 § 1 : la Cour conclut, à l’unanimité qu'il y a eu violation.(L’arrêt n’existe qu’en anglais.)

 

ORŠUŠ ET AUTRES c. CROATIE 17 juillet 2008 - Article 41 : 1 300 euros (EURà chaque requérant ) pour dommage moral et, conjointement, 2 000 EUR pour frais et dépens. Jurisprudence antérieure  : “Affaire relative à certains aspects du régime linguistique de l'enseignement en Belgique” c. Belgique (Fond), arrêt du 23 juillet 1968, série A n° 6, § 10 ; Beyeler c. Italie (satisfaction équitable) [GC], n° 33202/96, § 27, 28 mai 2002 ; Campbell et Cosans c. Royaume-Uni, arrêt du 25 février 1982, série A n° 48, pp. 14 et 15, § 33 ; Chassagnou et autres c. France [GC], nos. 25088/94, 28331/95 et 28443/95, §§ 91-92, CEDH 1999-III ; Devlin c. Royaume-Uni, n° 29545/95, § 23, 30 octobre 2001 ; Efstratiou c. Grèce, arrêt du 18 décembre 1996, Recueil 1996-VI, pp. 2358 et 2359, § 28 ; Gast et Popp c. Allemagne, no 29357/95, § 70, CEDH 2000 ; Gülmez c. Turquie, n° 16330/02, § 29, 20 mai 2008 ; Hoogendijk c. Pays-Bas (déc.), n° 58461/00, 6 janvier 2005 ; Hugh Jordan c. Royaume-Uni, n° 24746/94, § 154, 4 mai 2001 ; Kjeldsen, Busk Madsen et Pedersen c. Danemark, arrêt du 7 décembre 1976, série A n° 23, p. 26, § 51 ; König c. Allemagne, arrêt du 28 juin 1978, série A n° 27, § 89 et § 90 ; Okpisz c. Allemagne, n° 59140/00, § 33, 25 octobre 2005 ; Price c. Royaume-Uni, n° 33394/96, §§ 24-30, CEDH 2001-VII ; Pudas c. Suède, arrêt du 27 octobre 1987, série A n° 125-A, p. 14, § 31 ; Smith et Grady c. Royaume-Uni, nos. 33985/96 et 33986/96, § 120, CEDH 1999-VI ; Soering c. Royaume-Uni, arrêt du 7 juillet 1989, série A n° 161, p. 34, § 88 ; Stec et autres c. Royaume-Uni [GC], n° 65731/01, § 51, CEDH 2006 ; Süßmann c. Allemagne, arrêt du 16 septembre 1996, Recueil des arrêts et décisions 1996-IV, pp. 1172-73, § 48 ; Thlimmenos c. Grèce [GC], n° 34369/97, § 44 et § 57, CEDH 2000-IV ; Tinnelly & Sons Ltd et autres et McElduff et autres c. Royaume-Uni, arrêt du 10 juillet 1998, Recueil des arrêts et décisions 1998-IV, pp. 1656 et 1657, §§ 61 et 62 ; Tserkva Sela Sosulivka c. Ukraine, n° 37878/02, § 42, 28 février 2008 ; V. c. Royaume-Uni [GC], n° 24888/94, § 71, CEDH 1999-IX ; Valašinas c. Lituanie, n° 44558/98, § 117, CEDH 2001-VIII ; Valsamis c. Grèce, arrêt du 18 décembre 1996, Recueil 1996-VI, pp. 2324 et 2325, § 31 ; Willis c. Royaume-Uni, n° 36042/97, § 48, CEDH 2002-IV ; Young, James et Webster c. Royaume-Uni, arrêt du 13 août 1981, série A n° 44, p. 25, § 63 ; Zarb Adami c. Malte, n° 17209/02, § 76, CEDH 2006

 

 

DROIT A L'INSTRUCTION    JUSTIFICATION OBJECTIVE ET RAISONNABLE   PROPORTIONALITE RACE

D.H. ET AUTRES c. REPUBLIQUE TCHEQUE

Cour (Grande Chambre)

13/11/2007

 

L’affaire concerne la scolarisation des requérants dans des écoles spéciales, en raison, selon eux, de leur origine rom.

Entre 1996 et 1999, les requérants furent placés dans des écoles spéciales (zvláštní školy) destinées aux enfants atteints de déficiences intellectuelles et ne pouvant pas suivre un cursus scolaire ordinaire. Selon la loi, un tel placement est ordonné par le directeur de l’école sur la base des résultats d’un test des capacités intellectuelles de l’enfant, effectué dans un centre d’orientation psychopédagogique avec le consentement du représentant légal de l’enfant.

Contestant la fiabilité des tests effectués et estimant que leurs parents n’avaient pas été suffisamment informés des conséquences de leur consentement au placement, 14 des requérants demandèrent à l’office des écoles (školský úřad) d’Ostrava de réexaminer leur situation ; celui-ci estima que les décisions attaquées étaient conformes à la législation. Par ailleurs, 12 des requérants saisirent la Cour constitutionnelle ; ils soutenaient que leur placement dans des écoles spéciales s’analysait en une pratique générale créant une ségrégation et une discrimination raciale du fait de la coexistence de deux systèmes scolaires autonomes, à savoir des écoles spéciales pour les Roms et des écoles primaires « normales » pour la population majoritaire. La Cour constitutionnelle rejeta leur recours le 20 octobre 1999.

La requête a été introduite devant la Cour européenne des droits de l’homme le 18 avril 2000 et déclarée en partie recevable le 1er mars 2005 à l’issue d’une audience de chambre.

Par un arrêt de chambre du 7 février 2006, la Cour a conclu, par six voix contre une, à la non-violation de l’article 14 de la Convention combiné avec l’article 2 du Protocole no 1.

Le 5 mai 2006 les requérants ont demandé le renvoi de l’affaire devant la Grande Chambre conformément à l’article 432 de la Convention. Le 3 juillet 2006, le collège de la Grande Chambre a accepté ladite demande.

Les intéressés se plaignaient d’avoir subi une discrimination dans la jouissance de leur droit à l’instruction en raison de leur origine rom.

 

Décision de la Cour

Article 14 combiné avec l’article 2 du Protocole no 1

La Cour rappelle que la chambre avait conclu à la non-violation de l’article 14 de la Convention combiné avec l’article 2 du Protocole no 1. Elle avait estimé que le Gouvernement tchèque avait prouvé que le système des écoles spéciales en République tchèque n’était pas conçu pour accueillir uniquement des enfants roms et qu’au sein de ces établissements de multiples efforts étaient déployés pour aider certaines catégories d’élèves à acquérir des connaissances de base. Sur ce point, la chambre avait observé que la réglementation relative aux modalités de placement des enfants dans des écoles spéciales n’avait pas trait à l’origine ethnique des élèves, mais poursuivait le but légitime de l’adaptation du système d’éducation aux besoins, aptitudes ou déficiences des enfants.

La Grande Chambre remarque tout d’abord que, du fait de leurs vicissitudes et de leur perpétuel déracinement, les Roms constituent une minorité défavorisée et vulnérable, qui a un caractère particulier. Ils ont dès lors besoin d’une protection spéciale qui s’étend également au domaine de l’éducation.

Sur l’existence d’une présomption de discrimination indirecte. Les requérants soutiennent avoir subi, sans justification objective et raisonnable, un traitement moins favorable que celui réservé aux non-Roms dans une situation comparable, du fait de leur placement dans des écoles spéciales. Ils présentent à cet égard des données statistiques établies à partir des informations fournies par les directeurs d’école, statistiques selon lesquelles plus de la moitié des élèves placés dans les écoles spéciales à Ostrava étaient roms.

La Cour relève que selon les rapports soumis conformément à la Convention-cadre pour la protection des minorités nationales du Conseil de l’Europe, les autorités tchèques ont admis, en 1999, que certaines écoles spéciales comptaient de 80 % à 90 % d’enfants roms et, en 2004, qu’un « grand nombre » d’enfants roms continuaient à être orientés vers les écoles spéciales. D’autre part, il résulte notamment d’un rapport de l’ECRI (Commission européenne contre le racisme et l’intolérance) publié en 2000 que les enfants roms étaient « très largement sur représentés » dans les écoles spéciales. La Cour observe que, même si le pourcentage exact des enfants roms placés à l’époque des faits dans des écoles spéciales reste difficile à établir, leur nombre était démesurément élevé et que ces écoles spéciales comptaient majoritairement des enfants roms.

La Cour estime que les éléments de preuve présentés par les requérants peuvent être considérés comme suffisamment fiables et révélateurs pour faire naître une forte présomption de discrimination indirecte et qu’il appartient donc au Gouvernement de démontrer que cette différence d’effet de la législation était le résultat de facteurs objectifs qui n’étaient pas liés à l’origine ethnique.

Sur l’existence d’une justification objective et raisonnable

La Cour reconnaît que, en maintenant le système des écoles spéciales, la République tchèque cherchait à trouver une solution pour les enfants ayant des besoins éducatifs spécifiques. La Cour partage cependant les préoccupations des autres organes du Conseil de l’Europe qui ont exprimé leurs inquiétudes quant au programme de niveau inférieur suivi par ces écoles et, en particulier, quant à la ségrégation engendrée par ce système.

Quant aux tests d’évaluation auxquels les enfants ont été soumis la Cour estime qu’il existe un risque que les tests soient entachés de préjugés et que leurs résultats ne soient pas lus à la lumière des particularités et des caractéristiques spécifiques des enfants roms qui les subissent. A cet égard, elle observe notamment que, selon l’ECRI, l’orientation des enfants roms vers des établissements spéciaux destinés aux enfants souffrant de retards mentaux apparaissait souvent « quasi automatique », ce qui exigeait de vérifier que les tests utilisés étaient « équitables » et que les capacités de chaque enfant étaient « évaluées correctement ». Par ailleurs, selon le Commissaire aux Droits de l’Homme du Conseil de l’Europe, les enfants roms étaient souvent placés dans des classes pour élèves ayant des besoins spéciaux, « sans évaluation psychologique ou pédagogique adéquate, les critères réels étant leur origine ethnique ». Dans ces conditions, la Cour estime que les résultats des tests ne sauraient servir de justification à la différence de traitement litigieuse.

Quant au consentement parental, élément décisif selon le gouvernement tchèque, la Cour n’est pas convaincue que les parents des enfants roms, en tant que membres d’une communauté défavorisée et souvent sans instruction, étaient capables d’évaluer tous les aspects de la situation et les conséquences de leur consentement. En tout état de cause, eu égard à l’importance fondamentale de la prohibition de la discrimination raciale, la Grande Chambre considère que l’on ne saurait admettre la possibilité de renoncer au droit de ne pas faire l’objet d’une telle discrimination.

Pour conclure, la Cour note qu’il ressort des travaux de l’ECRI ainsi que du rapport du Commissaire aux Droits de l’Homme du Conseil de l’Europe, qu’il existe des difficultés liées à la scolarisation des enfants roms non seulement en République tchèque mais aussi dans d’autres Etats européens. Elle note avec satisfaction que, à la différence de certains pays, la République tchèque a choisi de s’attaquer à ce problème. Cependant, tout en reconnaissant les efforts des autorités tchèques en vue de scolariser les enfants roms, et les difficultés rencontrées par les autorités tchèques, la Cour n’est pas convaincue que la différence de traitement ayant existé entre les enfants roms et les enfants non roms reposait sur une justification objective et raisonnable et qu’il existait un rapport raisonnable de proportionnalité entre les moyens employés et le but à atteindre. A cet égard, elle note avec intérêt que la nouvelle législation tchèque a supprimé les écoles spéciales et qu’elle contient des dispositions relatives à l’éducation au sein des écoles ordinaires des enfants ayant des besoins éducatifs spécifiques, dont les enfants socialement défavorisés. Dès lors qu’il a été établi que l’application de la législation tchèque pertinente avait à l’époque des faits des effets préjudiciables disproportionnés sur la communauté rom, les requérants en tant que membres de cette communauté ont nécessairement subi le même traitement discriminatoire.

La Cour conclut : 

- par treize voix contre quatre, à la violation de l’article 14 de la Convention européenne des Droits de l’Homme combiné avec l’article 2 du Protocole no 1 à la Convention, du fait de la scolarisation des requérants dans des écoles spéciales, en raison de leur origine rom.

En application de l’article 41, la Cour alloue à chacun des requérants 4 000 Euros (EUR) pour dommage moral, ainsi que 10 000 EUR conjointement pour frais et dépens

 

D.H. et autres c. République tchèque (requête no 57325/00)13/11/2007 Exception préliminaire rejetée (non-épuisement des voies de recours internes) ; Violation de l'art. 14+P1-2 ; Mesures générales rejetées ; Préjudice moral - réparation pécuniaire ; Remboursement partiel frais et dépens

Opinions Séparées Zupančič, Jungwiert, Borrego Borrego et Šikuta dissidentes

Droit en Cause Loi de 1984 sur les écoles ; Loi de 2004 sur les écoles ; Décret no 127/1997, articles 2, 6 et 7 ; Décret no 73/2005, articles 1 et 2

Pour en savoir plus :

Jurisprudence antérieure : Affaire " relative à certains aspects du régime linguistique de l'enseignement en Belgique " c. Belgique (fond), arrêt du 23 juillet 1968, série A no 6, § 10 ; Aktas c. Turquie (extraits), no 24351/94, § 272, CEDH 2003-V ; Anguelova c. Bulgarie, no 38361/97, § 111, CEDH 2002-IV ; Beyeler c. Italie (satisfaction équitable) [GC], no 33202/96, § 27, 28 mai 2002 ; Broniowski c. Pologne ([GC], no 31443/96, § 189, CEDH 2004-V ; Buckley c. Royaume-Uni, arrêt du 25 septembre 1996, Recueil 1996-IV, § 76 ; Chapman c. Royaume-Uni [GC], no 27238/95, §§ 93-94 et 96, CEDH 2001-I ; Chassagnou et autres c. France [GC], nos 25088/94, 28331/95 et 28443/95, §§ 91-92, CEDH 1999-III ; Connors c. Royaume-Uni, no 66746/01, §§ 83 et 84, 27 mai 2004 ; Deweer c. Belgique, arrêt du 27 février 1980, série A no 35, § 51 ; Hermi c. Italie [GC], no 18114/02, § 73, CEDH 2006 ; Hoogendijk c. Pays-Bas (déc.), no 58461/00, 6 janvier 2005 ; Hugh Jordan c. Royaume-Uni, no 24746/94, § 154, 4 mai 2001 ; Hutten-Czapska c. Pologne ([GC], no 35014/97, § 235-237, CEDH 2006 ; Ilhan c. Turquie [GC], no 22277/93, § 59, CEDH 2000-VII ; Larkos c. Chypre [GC], no 29515/95, § 29, CEDH 1999-I ; Leyla Sahin c. Turquie [GC], no 44774/98, § 128, CEDH 2005-XI ; Natchova et autres c. Bulgarie [GC], nos 43577/98 et 43579/98, §§ 145, 147 et 157, CEDH 2005 ; Okpisz c. Allemagne, no 59140/00, § 33, 25 octobre 2005 ; Pfeifer et Plankl c. Autriche, arrêt du 25 février 1992, série A no 227, §§ 37-38 ; Salman c. Turquie [GC], no 21986/93, § 100, CEDH 2000-VII ; Stec et autres c. Royaume-Uni [GC], no 65731/01, § 51, CEDH 2006 ; Thlimmenos c. Grèce [GC], no 34369/97, § 44, CEDH 2000-IV ; Timichev c. Russie, nos 55762/00 et 55974/00, §§ 56, 57 et 58, CEDH 2005 ; Üner c. Pays-Bas [GC], no 46410/99, § 41, CEDH 2006 ; V. c. Royaume-Uni [GC], no 24888/94, § 57, CEDH 1999-IX ; Valsamis c. Grèce, arrêt du 18 décembre 1996, Recueil 1996-VI, § 28 ; Willis c. Royaume-Uni, no 36042/97, § 48, CEDH 2002-IV ; Zarb Adami c. Malte, no 17209/02, § 76 et §§ 77-78, CEDH 2006

Sources Externes Recommandation no R (2000) 4 du Comité des Ministres aux Etats membres sur l'éducation des enfants roms/tsiganes en Europe ; Recommandation de l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe no 1203 (1993) relative aux Tsiganes en Europe ; Recommandation de l'Assemblée parlementaire no 1557 (2002) relative à la situation juridique des Roms en Europe ; Recommandation de politique générale no 3 de l'ECRI : La lutte contre le racisme et l'intolérance envers les Roms/Tsiganes ; Recommandation de politique générale no 7 de l'ECRI sur la législation nationale pour lutter contre le racisme et la discrimination raciale ; Convention-cadre pour la protection des minorités nationales ; Rapport final de M. Alvaro Gil-Robles sur la situation en matière des droits de l'homme des Roms, Sintis et Gens du voyage en Europe (daté du 15 février 2006) ; Directive 97/80/CE du Conseil du 15 décembre 1997 ; Directive 2000/43/CE du Conseil du 29 juin 2000 ; Directive 2000/78/CE du Conseil du 27 novembre 2000 ; Pacte international relatif aux droits civils et politiques, article 26 .

 

 

 

 

Discrimination dans l'atteinte à un droit patrimonial

 

 

L'ingérence manifestement illégale sur le plan du droit interne représentée l'absence de motifs de nature à justifier le traitement différencié du requérant par rapport à d'autres personnes se trouvant dans une situation similaire quant à l'imposition de l'allocation en cause constitue une violation de l'article 1 du Protocole no 1

TEHLEANU C. ROUMANIE

Violation de l’article 1 du Protocole no 1

Violation de l’article 1 du Protocole no 1 combiné avec l’article 14

 

Pompier et disposant du statut de militaire, l’intéressé alléguait que l’allocation reçue à son départ à la retraite avait été illégalement soumise à l’impôt sur le revenu et se plaignait d’une discrimination compte tenu du fait que d’autres militaires se trouvant dans sa situation ont bénéficié d’une allocation non-imposée. Il invoquait l’article 1 du Protocole no 1 combiné avec l’article 14.

La Cour estime que l’ingérence dénoncée est manifestement illégale sur le plan du droit interne et, par conséquent, incompatible avec le droit au respect des biens du requérant. Elle note également que, contrairement au requérant, d’autres militaires affectés à la réserve ont bénéficié de cette allocation sans qu’elle fut grevée d’impôt, et ne trouve aucun motif de nature à justifier pareille discrimination. Elle conclut à l’unanimité à la violation de l’article 1 du Protocole no 1 pris isolément et combiné avec l’article 14.

 

Tehleanu c. Roumanie no 1578/03 Jurisprudence antérieure : Driha c. Roumanie no 29556/02, §§ 10-17, 21 février 2008; Kopecký c. Slovaquie [GC], no 44912/98, CEDH 2004‑IX,; Pressos Compania Naviera S.A. et autres c. Belgique arrêt du 20 novembre 1995, série A n332 et Smokovits et autres c. Grèce no 46356/99, § 32, 11 avril 2002

 


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